Diacres en vue du sacerdoce en paroisse : pour quoi faire ?

Alors que certains poursuivent leur formation universitaire, d’autres diacres ordonnés en vue du sacerdoce sont appelés par Mgr Aumonier à un an d’apostolat à temps plein en paroisse. Quels sont les enjeux de cette mission pour la paroisse qui les accueille, pour son curé et toute la communauté et pour le séminariste lui-même ?

Un choix

« Notre cursus est, je crois, vraiment fait sur mesure en fonction des besoins de chacun pour sa formation, et des besoins de l’Église catholique en Yvelines ! » Cette remarque de Laurent, ordonné diacre en vue du sacerdoce en septembre dernier et accueilli dans le groupement paroissial de Triel-Meulan [1] relève une des spécificités du séminaire de Versailles : chaque séminariste se voit proposer, en fonction de ses besoins, de ses charismes, de sa personnalité un parcours sur-mesure qui favorisera son discernement et son épanouissement. Cette approche ne peut se faire sans une écoute bienveillante et un dialogue entre les séminaristes, leur supérieur et l’évêque. La mission d’apostolat en paroisse se décide souvent suite à la demande du séminariste. Pour Louis, accueilli à Mantes-la-Jolie « il s’agit d’un souhait personnel que l’évêque a su entendre. Avant de poursuivre mes études, il me semblait important d’approfondir mon sens pastoral en paroisse pendant l’année diaconale. Je souhaitais être concrètement au service du peuple de Dieu et prendre le temps de donner un peu de ce que j’ai reçu avant de revenir aux études après mon ordination sacerdotale. » Alain – en mission cette année dans le groupement paroissial de Marly-le-Roi [1] – pressent que « l’évêque a pris la décision qu’il a pensé être la meilleure pour la portion du peuple de Dieu qui lui est confiée et pour son serviteur qui en est heureux ! »

Des enjeux

Le père Matthieu Williamson et LouisLe père Matthieu Berger, curé du groupement paroissial de Triel-sur-Seine, cadre immédiatement le propos : « la présence d’un diacre en vue du sacerdoce en paroisse permet de rappeler à chacun que le prêtre est avant tout serviteur. Là où l’on pourrait se laisser prendre à un rôle de « super manager », nous nous souvenons que nous avons avant tout une vocation au service ». C’est à cela que se prête toute l’année le séminariste ordonné diacre : il est au service de la paroisse et son aide est précieuse. Pour le père de Rubercy qui accueille Alain, l’enjeu est double : pour le futur prêtre, il s’agit d’une bonne école de formation, juste avant l’ordination, au contact des réalités d’une paroisse avec toutes ses facettes et tous ses acteurs, en particulier les prêtres et les prêtres dans leur relation aux diacres permanents et aux laïcs. Il découvre le ministère sacerdotal et paroissial de l’intérieur. Une vraie chance ! La paroisse, elle, prend conscience de l’importance de l’accompagnement des vocations et devient partie prenante de la formation des futurs prêtres.

Mission au service de la liturgie avec la prédication, les célébrations de baptêmes, enterrements, mariages…, mission au service des plus fragiles et des plus pauvres avec les visites aux personnes seules ou âgées, l’accompagnement d’équipe fraternelle, les visites à l’hôpital ou en maison de retraite et enfin mission auprès des jeunes, de l’aumônerie, des lycéens se préparant à la confirmation… Autant d’exemples de champs missionnaires qui permettent au jeune diacre de passer d’une conception de la paroisse empreinte d’imagination à une réalité bien concrète. L’idéal rêvé est corrigé par la rencontre des réalités telles qu’elles se présentent aujourd’hui : « je goûte aux joies nombreuses et aux difficultés de la vie en paroisse. Avant, j’avais des principes : je sais que je vais gagner en souplesse et en capacité d’adaptation » sourit Laurent. Le diacre intègre ce qu’il voit et comprend, dans sa réflexion et son discernement. « Je prends davantage conscience de la tâche qu’attend un prêtre en paroisse. J’observe et j’apprends beaucoup, sans être pressé par l’urgence et en ayant des missions plus légères que les prêtres. J’imagine qu’après cette expérience mon arrivée en paroisse comme vicaire sera plus sereine » précise Louis.

Vicaire ?

Le diacre en vue du sacerdoce reste en formation : il n’est pas encore ordonné prêtre et ne tient donc pas un rôle de vicaire de paroisse en soi. Pour autant, il fait partie intégrante de l’équipe fraternelle des prêtres et diacres permanents de la communauté paroissiale. Il est présent à l’EAP [3], au conseil pastoral, aux rencontres trimestrielles de doyenné, aux repas entre prêtres…

Sa jeunesse permet souvent d’aborder les sujets de manière nouvelle, de prendre du recul sur ce qui est vécu et sur les choix pastoraux. Son enthousiasme favorise le renouvellement des idées ! À Triel, le père Matthieu souligne combien Laurent est intégré dans la vie paroissiale et pastorale ; les fidèles comptent sur sa présence. Le fait que le jeune homme soit désormais ordonné – et non plus en discernement – renforce la confiance qui lui est portée : « J’essaie de bien faire ce qu’on me confie, d’être à l’écoute et accueillant pour toute personne. C’est beaucoup de bon sens, de naturel et de disponibilité à l’Esprit Saint ! Être à la place qu’il me donne et prendre soin des personnes que j’accompagne pour les aider à rencontrer Jésus, ou à vivre au quotidien avec Lui est mon seul désir. » précise le jeune diacre. Pour Alain, la présence l’an dernier d’un autre diacre en vue du sacerdoce [4] l’aide à trouver sa juste place au sein de la communauté paroissiale : « du curé aux fidèles, chacun a déjà appris à accueillir et à travailler avec un diacre en mission pastorale. Nous avons la chance d’avoir deux diacres permanents qui ont des missions bien distinctes. Cela favorise l’épanouissement de chacun. C’est la joie d’être membre de l’Église, membre du Corps du Christ où, malgré le nombre « tous les membres ne forment qu’un seul corps [5] ! » Louis, lui, a choisi d’écouter les conseils d’un « ancien » : être sur le terrain ! « Avec le patronage ou les équipes du catéchisme, nous avons une vraie porte d’entrée vers les familles souvent blessées qu’un prêtre ou un diacre permanent peuvent intimider. C’est l’avantage de la jeunesse ! Les relations vont s’étoffer avec le temps… »

Il ne faut pas pour autant minorer l’importance de la relation avec le curé : « Nous vivons sous le même toit, précise le père Olivier de Rubercy : nous prions ensemble, nous prenons nos repas ensemble. C’est un apport essentiel pour moi, je ne vis plus seul. Et nos discussions à table, notre rendez-vous hebdomadaire, toutes nos rencontres me permettent d’aider Alain à mettre des mots sur ce qu’il vit, à accueillir ses impressions, à réfléchir avec lui sur certaines questions ». Le curé et le diacre mettent en place un véritable compagnonnage qui permet dans la confiance de partager les expériences mutuelles et de relire attentivement ensemble pour préparer le prêtre de demain. Louis relève combien « la parole est libre et constructive : je sais qu’à tout moment je peux demander de l’aide. Je bénéficie de précieux conseils dans nos discussions et les prêtres de la paroisse prennent le temps nécessaire pour me guider dans le ministère qui m’est confié ».

Accompagnement et suivi de formation

Cet accompagnement quotidien est soutenu par un suivi au niveau diocésain. Le responsable de la formation des séminaristes, le père Matthieu Dupont leur propose un programme de formation diaconale en faisant intervenir différents service diocésain (La mission pour la famille, le père Loïck Bélan pour la pastorale liturgique et sacramentelle, l’économe diocésain, …). Ils sont ainsi mis en lien avec la vie diocésaine.

Cette année d’apostolat en paroisse n’éloigne pas les jeunes diacres de la formation intellectuelle ! Si la prédication permet de travailler la Parole de Dieu, Alain, Louis et Laurent sont amenés à faire l’expérience d’intégrer dans l’exercice du ministère des temps de lecture personnelle. Ils sont aidés en cela par le père Pierre Delort-Laval qui les accompagne intellectuellement en groupe en leur proposant des lectures qui éclairent tel ou tel aspects du ministère. Ils se rencontreront six fois dans l’année.

Chaque séminariste poursuit ses rencontres régulières avec son père spirituel.

Vocations et évangélisation

Alors que les vocations ont parfois du mal à émerger, le diacre en vue du sacerdoce porte au monde un beau témoignage : « Les jeunes sont très touchés par la présence de Laurent. Ils le connaissent bien : il était déjà en stage dans notre groupement paroissial l’an dernier. Il a cheminé avec nous dans sa vocation et a été énormément porté par la prière des paroissiens. Les adultes aussi sont très heureux de sa présence qui est originale et qui interroge… » explique le père Matthieu Berger. Pour le père Olivier de Rubercy, cette présence relève même de l’enjeu pour les vocations : « Les jeunes peuvent rencontrer de près un autre jeune, bientôt prêtre. Ils comprennent que l’on ne naît pas prêtre mais qu’on le devient peu à peu, par appel de Dieu, et que cela rend heureux. » Joie aussi de voir la prière intense pour les vocations porter des fruits. Les personnes plus éloignées constatent que l’Église est bien vivante : Elle continue de se développer par l’arrivée de plus jeunes, contrairement aux idées reçues.

Pour Laurent, Louis et Alain, cette année reste pour eux l’occasion d’exercer à part entière le service de la Parole de Dieu, de la liturgie et des plus pauvres : « J’ai confiance que tout ce que je vis sera au service du ministère à venir, partage Alain. Je veux avant tout cette année être proche, dans la joie comme dans la peine, de toute personne rencontrée et prendre conscience des charismes qui me sont donnés pour les affiner et les mettre au service de toute la communauté, sans cesser d’avoir les yeux fixés sur Jésus-Christ ». « À travers ce don, marqué par la gratuité, dit Louis, je veux faire grandir mon amour de Dieu et de son peuple. » Lucide, le jeune homme poursuit dans un sourire : « Un effet secondaire sera certainement de prendre le temps de clarifier le sujet d’étude qui m’attend à la fin de l’année ! »

Source : Diocèse de Versailles

[1] Groupement paroissial de Meulan – Triel-sur-Seine

[2] Groupement paroissial de Marly-le-Roi/Le Pecq, L’Étang-la-Ville, Le Port-Marly

[3] Équipe d’Animation Paroissiale

[4] Le père Bertrand d’Abzac, ordonné prêtre en juin 2017

[5] 1 Co 12, 12