Homélie de la fête du Christ Roi

Le Christ Roi, c’est tout d’abord une plongée au cœur du mystère de Dieu et de l’homme.

Mystère de Dieu indissociable d’un autre mystère, celui du mal. Deux mystères irréductiblement opposés en même temps qu’ils sont liés:

  • Mystère de la violence de celui qui veut dominer et avoir raison
  • Mystère de l’amour de celui qui humblement écoute et reste toujours prêt au pardon

Tout homme est habité par ces deux forces, celle d’aimer et celle de la violence. Voilà pourquoi tout homme est un mystère pour lui-même et pour l’autre. Tout homme s’étonne devant ce combat. Tout est à la fois libre et piégé, libre d’aimer ou de ne pas aimer, piégé par des forces qui l’empêchent d’aimer ou de résister au mal. Jésus, comme homme, n’échappe pas à ce combat. Mais en lui Dieu n’a laissé aucune prise dans sa vie à la force du mal.

La Croix, vérité pour tout homme, avec ce cri lancé à Jésus: sauve-toi toi-même, lancé trois fois comme les trois tentations du démon dans le désert. Ce cri est celui de tout homme, croyant ou pas: et si Dieu existait? Qu’il me sauve! Et si tu es Dieu, montre-le nous? Sors-nous de ce cauchemar de violence, de larmes et de sang…Cauchemar de violence, de larmes et de sang, à tous les niveaux, de nos familles en ce jour de mobilisation contre les violences faites aux femmes jusqu’aux guerres mondiales en ce jour de présence du Pape à Hiroshima pour crier la paix…

C’est ensuite plusieurs regards :

  • Celui du peuple qui restait là et regardait: notre regard quelque fois, mélange de curiosité, de complicité, d’attentisme, de non engagement…
  • Celui des chefs qui tournaient Jésus en dérision: notre regard quelque fois avec nos jugements et nos critiques.
  • Celui du bon larron qui regarde Jésus lui aussi, mais c’est un autre regard qui se laisse regarder.
  • On retrouve ces regards chez chacun de nous.

Mais nous retenons le regard de celui qui se laisse regarder par le Christ. L’homme Jésus, homme des douleurs et dans la violence comme moi, me regarde avec un regard d’innocence comme il n’y en pas d’autres dans le monde, regard qu’on retrouve chez certains enfants violentés qui nous bouleverse.

Cette vérité du regard de Jésus, vérité d’amour, me bouleverse, me remue, et me renvoie à moi-même, mes propres contradictions, mes responsabilités, mes culpabilités, mes fragilités, mes combats plus ou moins réussis…ou ratés…Je ne suis tellement pas parfait, j’aurais tellement pu être l’un de ces soldats ou l’un de ces bourreaux…(à quoi tient une vie? Telle naissance? Tels parents? Telle éducation?…)

Ce regard de celui qui souffre comme moi et à côté de moi et avec moi est le regard de celui qui est pur de tout péché et donc victorieux de tout mal. Ce regard me fait pleurer en même temps qu’il me fait crier: souviens-toi de moi. Cri de confiance, cri d’abandon qui enfin me sauve. Cri qui me fait entendre une promesse immédiate, sans conditions: aujourd’hui tu seras avec moi dans le paradis.

Baudoin (prêtre)