Eglise saint Martin à Triel sur seine
Histoire de l’église
Pour le visiteur, l’église Saint-Martin de Triel apparaît à la fois comme très belle et très surprenante. Elle enjambe même une route, elle semble faite de plusieurs morceaux qui ne sont pas dans le même axe. C’est qu’elle a une longue histoire et qu’elle porte la marque de deux grandes époques, le XIe et le XVIe siècles.
La paroisse
La paroisse de Triel remonterait au XIe siècle, et la première construction de l’église actuelle au XIIe siècle, du moins quant au porche extérieur Nord-Ouest, côté opposé au maître-autel. Cette église aurait remplacé une église romane, entourée d’un cimetière et elle-même construite sur un cimetière gallo-romain, aménagé à la lisière de la forêt de l’Hautil.
Avant la révolution, la paroisse de Triel était du doyenné de Meulan, et faisait partie de l’immense diocèse de Rouen, 1 388 paroisses et 4 000 prêtres séculiers. Le territoire de la paroisse était très étendu. D’abord tout Triel, puis Ecquancourt, ou hameau de la roche ; Chanteloup, Carrières-sous-Poissy, avec chapelle vicariale dédiée à saint Joseph (1659). À l’Ouest, Triel comprenait aussi Port-Maron, Maron ancien plâtrier qui donna son nom au port qu’il avait aménagé. Pour tout ce territoire, un seul curé avec plusieurs prêtres comme vicaires à Triel, à Chanteloup et à Carrières, en plus de chapelains et de « prêtres habitués ».
L’église
Au début du XIIIe siècle en effet, vers 1240, fut construite une église de trente mètres de long, qui comprenait la nef actuelle, un chœur, un transept et un chevet plat qui s’arrêtait à peu près au niveau de la rue Galande. (On retrouve encore aujourd’hui de tels chevets à Andrésy ou Jouy-le-Moutier, par exemple). Il comprenait aussi les deux bas-côtés que l’on voit encore aujourd’hui.
Vers la fin du XIIIe siècle, la voûte de la nef, prévue un peu trop haute (17,10 m, hauteur que l’on retrouve encore au croisillon Sud), s’écroula et fut reconstruite plus basse (14,55 m), telle qu’on peut la voir encore aujourd’hui. Au XVe siècle on ajouta à l’église un second bas-côté sud, on dût pour cela abattre les anciens murs du XIIIe siècle.
Le porche situé sur le côté de la première travée de l’église, fait partiè de la même époque. C’est maintenant l’entrée principale de l’église. Au XVIe siècle, l’église fut jugée trop petite et pour l’agrandir on contruisit d’abord un nouveau chœur. Comme l’église du XIIIe menaçait ruine, il fut projeté de la démolir. C’est pourquoi, lors de la construction du chœur on ne s’est pas aligné sur l’ancienne nef, on a construit un chœur plus large.
Comme en bordure de l’église se trouvait le chemin royal (le seul vraiment praticable à cette époque), qui allait de la Seine jusqu’à Cheverchemont et les hauteurs de l’Hautil, on a simplement construit par-dessus cette route. Ce qui vaut à l’église de Triel cette très grande originalité de voir ce chemin de l’Hautil passer sous l’église.
Lorsque le chœur fut construit, se posa le problème de la démolition de l’ancienne nef. On ne sait pas exactement pourquoi (faute d’argent, ou hésitation à démolir un si bel édifice), mais les architectes ont renoncé à la démolition. Ils ont simplement construit un mur en biais pour raccorder le chœur et la nef, sur laquelle ils ont posé un étrésillon transversal provisoire ! (pour empêcher l’écroulement des murs).
Tout autour du chœur, se trouvaient les bustes des statues du Christ-Enseignant, de la Vierge et des apôtres. Hélas, à la révolution, l’église fut fermée au culte catholique, toutes ces statues furent détruites, seule celle du Christ fut sauvegardée, car on la faisait passer pour une représentation de l’Être Suprême. C’est la seule que l’on voit aujourd’hui.
Lors de la dernière restauration du chœur (1988) l’architecte a voulu laisser apparentes les traces de deux anciennes statues de chaque côté du Christ.
Après la révolution, l’église donnait bien des signes de fatigue. De gros étrésillons de bois traversaient la nef pour soutenir la poussée des murs, à l’extérieur il y avait des échaffaudages, le porche royal était encore à ciel ouvert en 1965… Bref, l’église était plus ou moins promise à la démolition.
Elle fut classée monument historique en 1850, mais rayée en 1887 parce que condamnée à la ruine. Une notice de 1881, signée Eugène Lefèvre-Pontalis dit ceci : « Il est très regrettable que la restauration de l’église n’ait pas encore été entreprise. Comme la nef, les bas-côtés et le transept menacent ruine, il faudra tôt ou tard se décider à les démolir en grande partie pour les relever sur le même plan ! »
Heureusement, même en ce mauvais état, l’église a tenu bon jusqu’à ce que les techniques modernes puissent lui venir en aide. Elle fut reclassée en 1894. Sous la direction des Beaux-Arts, une première restauration a été effectuée de 1911 à 1915 concernant la partie du XIIIe siècle. On dut élever des murs de soutènement sous les gros arcs et les doubleaux de la nef, afin de tenir toute la voûte en l’air et de reprendre les colonnes par les fondations qui étaient inexistantes. Au décintrage qui eut lieu en 1913 le tassement fut insignifiant. La seconde grande restauration a été commencée en 1934, on a refait la même chose pour toute la partie du croisillon Sud, celui de l’horloge. Là encore on a repris les fondations qui étaient très faibles.
La touche finale, pour la nef, fut donnée le 25 décembre 1976, sous l’impulsion du maire de Triel, Louis Champeix. On a réussi à introduire du ciment et du béton à l’intérieur des gros piliers centraux, pour les renforcer ; et à la suite de cela on put enfin retirer les trois gros étrésillons qui défiguraient la nef et retrouver ce magnifique vaisseau tel qu’il avait été construit au XIIIe siècle, et tel que nous le voyons aujourd’hui.
Enfin la dernière restauration eut lieu en 1988, sous la direction de Jean-Claude Rochette, architecte en chef des Monuments Historiques, elle a eu pour but le nettoyage et la peinture du chœur du XVIe siècle, qui en avait bien besoin. On a remplacé quelques pierres, notamment dans les deux premiers piliers du chœur.
Au cours de ce remplacement, on a découvert sous des colonnettes qui avaient dû être placées là au moment de raccorder les deux édifices, la base du pilier du XVIe siècle. L’architecte a donc imaginé un moyen de soutenir ces colonnettes à mi-hauteur et l’on a vu réapparaître ce pilier dans son ensemble, alors qu’une partie du pied était cachée depuis le XVIe siècle.
Tout récemment la tempête de 1990 avait causé quelques dégâts à la toiture et avait arraché la silhouette de saint Martin qui se trouvait sur la deuxième pointe du clocher (et qui servait de girouette !). Les dégâts ont été réparés et Saint Martin a retrouvé à sa place grâce à une équipe d’alpinistes.
Il faut ajouter à l’ensemble de ces restaurations, celle de la cloche qui eu lieu en 1957. À cette occasion, elle fut descendue du clocher pour partir dans les ateliers.
Aujourd’hui donc, l’église Saint-Martin de Triel a retrouvé toute la beauté que les siècles lui ont donnée.
La chapelle de la Sainte Vierge
Dans le fond de l’église et d’un style beaucoup plus récent (très XIXe siècle) se trouve la chapelle de la Sainte Vierge. La statue récemment restaurée semble dater du XVIe ou du XVIIe siècle. Elle représente Marie sous le vocable de « Refuge des pécheurs » (l’Église célèbre cette fête le 16 janvier). Les vitraux de cette chapelle retracent les principaux épisodes de la vie de Marie, depuis sa naissance, sa présentation au temple, l’annonciation, son mariage avec Joseph, la visitation, la naissance de Jésus, enfin l’Assomption, et son couronnement dans le ciel. C’est là que se trouve le Saint Sacrement et que sont célébrées les messes en semaine.
Les orgues
Avant la révolution il devait sûrement y avoir un orgue dans l’église, car parmi le nombreux clergé de Triel, il est fait mention d’un « Prêtre organiste » mais on ne trouve aucune trace de cet orgue qui a du être détruit par les révolutionnaires.
L’orgue actuel fut sûrement construit par E. et J. Abbey vers 1890 ou 1900. C’était à l’origine un orgue « de salon », racheté par la paroisse et placé dans l’église en 1927. (L’inauguration a eu lieu le 26 juin 1927). Il a subi un entretien assez bon au cours des années et a même été enrichi de quelques jeux pour lui permettre de faire face à un plus grand répertoire et de mieux servir ainsi la liturgie.
Le dernier relevage date de 1982 ; c’est au cours de ce relevage qu’ont été posés les tuyaux de façade qui sont muets. Les travaux de restauration du chœur en 1988 (malgré une bonne protection) lui ont occasionné quelques dégâts et l’on espère pouvoir bientôt faire un nouveau relevage.
Il comporte quinze jeux, dont un « Keraulophone », ce qui est plutôt rare.
Les vitraux
Si l’église de Triel mérite d’attirer l’attention pour son architecture, la belle série de vitraux qu’elle renferme n’est pas moins intéressante à examiner. Beaucoup sont en grande partie du XVIe siècle, parfois complétés ou restaurés, mais souvent d’origine. Ils sont attribués pour la plupart à Enguerrant Le Prince et ses deux fils, Jean et Nicolas (ateliers de Paris et de Beauvais), quelques-uns, peut-être à Pinagrier et à ses élèves (Paris). Il y a dans ces vitraux à la fois des scènes d’évangile ou de la vie des saints très vénérés à l’époque de leur construction. Quelques-uns viennent d’être restaurés, grâce aux techniques modernes qui font disparaître les « plombs de casse » disgracieux qui avaient été rajoutés jadis, surtout dans les visages.
Pour les identifier, nous commencerons par le chœur, puis la station côté sacristie et nous ferons le tour de l’église.
Le chœur
Il est éclairé par cinq fenêtres. Une seule, la fenêtre centrale a conservé un vitrail du XVIe siècle représentant la crucifixion. Au centre le Christ est cloué sur la croix, le sang coule de ses plaies. Des anges le recueillent pieusement dans des coupes. Ce motif touchant a été fort en vogue à partir du XIIIe et surtout du XIVe siècle. Au pied de la croix, debout, se tiennent Marie (Stabat Mater) et Jean. Marie-Madeleine est affaissée par la douleur.
La station (côté sacristie)
Le premier vitrail, sous lequel est écrit la date : « en l’an mil-cinq-cent » (certains pensent qu’il s’agit de 1520), représente trois scènes.
À gauche saint Jean-Baptiste présentant « l’agneau de Dieu », au centre la conversion de saint Hubert, qui voit lui apparaître un cerf portant une croix dans ses bois et à droite, un religieux dont on pense qu’il s’agit de saint Fiacre patron des jardiniers.
Au sommet de ce vitrail on peut voir Jésus tel que Pilate l’a présenté à la foule en disant : « voici l’homme » (Ecce homo). En bas, les personnages agenouillés sont sûrement les donateurs du vitrail.
La verrière suivante est beaucoup plus récente puisqu’elle a été réalisée en 1903 par les ateliers Schwartz d’Andrésy. Elle représente le martyre de saint Vincent. Vincent était diacre de l’Église de Saragosse (Espagne). Valérien, évêque de cette ville, que l’on voit à côté de lui dans le vitrail, ayant une grande difficulté de parole, ce fut Vincent qui répondit à sa place lorsqu’ils furent conduits ensemble devant le tribunal de Dacien, pendant la persécution de Dioclétien. L’évêque fut condamné à l’exil et Vincent resta pour souffrir et mourir.
Il est représenté ici refusant d’offrir un sacrifice idolâtre à la statue de Jupiter Olympien. À ses pieds se trouvent tous les instruments de tortures dont on le menace s’il persévère dans sa foi. Il est le patron des vignerons et l’on célèbre sa fête le 22 janvier.
Le déambulatoire (derrière l’orgue)
Le premier vitrail représente l’Arbre de Jessé. Jessé était le père de David, l’ancêtre du Christ, et donc le point de départ de l’arbre généalogique de Jésus, « Fils de David ». Un arbre vigoureux sort de sa poitrine et parmi les six rois représentés ici, on reconnait David, l’auteur des psaumes, qui joue de la lyre (le Kinor). À gauche, le prophète Isaïe porte un phylactère sur lequel on lit : « Un rejeton sortira de la souche de Jessé » (Isaïe 11), et à droite, Moïse tient une banderolle sur laquelle est écrit : « Une étoile sortira de Jacob » (Nombres 24).
Au sommet du vitrail, celui que tout cet arbre annonce, Jésus, dans les bras de sa Mère. Cette verrière, sûrement l’une des plus belles de Triel, est attribuée à Jean Le Prince, vers 1550.
Saint Vincent est aussi représenté, dans l’église, par cette belle statue. Il est revêtu du costume liturgique du Diacre, dalmatique et manipule, et porte à la main la palme du martyre. Il est mort vers l’an 304. Il rappelle l’époque où la plupart des habitants de Triel étaient des vignerons. (Le mot de vignerons désignait jadis l’ensemble de ceux qui travaillaient la terre).
Le vitrail suivant représente en haut à gauche, Saint Roch vêtu en pèlerin, son chien lui apporte un pain. Au centre : Saint Martin, (patron de la paroisse), dans un riche costume de l’époque, offre la moitié de son manteau à un pauvre. À droite : Saint Nicolas, évêque de Myre ; à ses pieds les trois enfants qu’il a ressuscités.
Le Martyre de Saint Sébastien occupe toute la partie basse du vitrail. À noter les costumes des archers (romains !) qui ressemblent plus aux costumes du XVIe siècle. Le donateur est inscrit sur le vitrail, Thomas Mercier de Meulan en 1557.
Le dernier vitrail raconte, dans la partie haute deux scènes de la vie de Saint Mathurin. D’un côté il délivre du démon la fille de l’empereur Maximin, Théodora, de l’autre ses parents sont baptisés par Polycarpe évêque de Sens.
Au dessous : scènes de la vie de Saint Nicolas : en bas, enfant, il se tient debout dans sa baignoire et juste au dessus : il donne une bourse à un malade. Sur le côté droit : il apaise la tempête. Il est ici le patron des jeunes filles et des mariniers. Saint Mathurin est le patron du donateur, Mathurin Le Bailly, dont le nom se lit en haut à gauche.
Dans l’angle de ce qui était jadis la chapelle Saint-Jacques (on voit encore des coquilles dans la voûte), se trouve le fameux vitrail du pendu dépendu…
Des pèlerins qui se rendaient à Compostelle passent la nuit dans une auberge à Toulouse. La servante très marrie de n’avoir pas réussi à séduire le fils (la scène est évoquée dans le haut à gauche), cache une coupe dans sa besace. Le jeune garçon est arrêté par des cavaliers et condamné à être pendu pour vol. Mais Saint Jacques le soutient de toutes ses forces si bien que la corde ne l’étrangle pas. Au retour de leur pèlerinage, après trente six jours d’absence, les parents vont avertir le juge que leur fils est toujours vivant. Ils le trouvent attablé et vont s’entendre dire : « Votre fils n’est pas plus vivant que mon poulet rôti, mais immédiatement le poulet se met debout et bat des ailes. »
Cette histoire a plusieurs origines et se retrouve, avec des variantes, dans la légende dorée. La date de 1554 est indiquée en haut à gauche. Ce vitrail assez mal restauré a probablement été offert par la confrérie de Saint Jacques, formée d’anciens pèlerins de Compostelle.
Le déambulatoire (en face de l’orgue)
Les vitraux situés de l’autre côté du déambulatoire sont d’une compréhension plus facile, il s’agit de scènes de la vie de Jésus.
Le premier nous montre la transfiguration. Le Christ apparaît dans sa gloire, ayant à ses côtés Moïse et Elie. En dessous, Pierre (au centre), Jacques et Jean. Pierre dit : « Seigneur il nous est bon d’être ici, si tu veux dressons là trois tentes », Et du ciel, Dieu le Père nous révèle : « Celui-ci est mon Fils bien-aimé ». Il faut voir ce vitrail le matin lorsque le soleil levant le fait vraiment briller de tous ses feux.
Le suivant nous montre le Baptême du Christ (moderne), par contre le martyre de Jean-Baptiste, en bas du vitrail pourrait dater de 1550.
À côté se trouve « l’adoration des mages » qui vient d’être restauré, il serait de 1869.
La verrière suivante du XVe siècle fut offerte par les habitants de Cheverchemont (hameau dépendant de la paroisse de Triel. Elle représente la « Dormition de Marie », son Assomption vers le ciel. Comme le veut une tradition, Marie est entourée des apôtres ; et au sommet du vitrail est représenté son couronnement dans le ciel, par la Sainte Trinité. (Voir la photo en page suivante).
En 1906 au moment de « l’inventaire », ce vitrail fut répertorié : « Mort d’une sainte inconnue » !
Le repas chez Simon
À la Station près de l’autel de Saint Joseph se trouve une des plus belles verrières de notre église ; elle daterait de 1520 environ et vient aussi d’être restaurée. Il s’agit du repas chez Simon le pharisien et de la pécheresse qui vient se prosterner aux pieds de Jésus. Mais on pourrait se servir de ce tableau pour illustrer aussi « la Cène » tant il est bien composé.
Le vitrail qui suit est plus récent, il représente la résurrection de Lazare. Par contre celui de l’entrée de Jésus à Jérusalem aurait été exécuté vers 1530. Notez le personnage perché dans un arbre qui nous fait penser à Zachée.
Enfin, après une verrière qui a disparu depuis longtemps, les deux dernières fenêtres nous montrent la crucifixion et la résurrection de Jésus. Elles datent de 1550 environ malgré quelques restaurations plus récentes.
Il faut voir tous ces vitraux l’après-midi pour en apprécier le jeu des couleurs.
Liste des saints figurés dans notre église
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Biographie de saint Martin (316–397)
L’icône de la charité, modèle du moine et de l’apôtre.
Le manteau
L’épisode du manteau partagé domine largement l’iconographie martinienne. Solidement enracinée dans la culture et la piété populaire, cette image fait de Martin une icône de la charité. Au cœur d’un hiver particulièrement rude et à l’aube d’une journée ordinaire, en l’an 337, un pauvre à moitié nu implore la pitié aux portes d’Amiens. Faisant fi des moqueries de ses semblables, un soldat à cheval saisit son glaive, découpe en deux la large cape rouge qui recouvre sa cuirasse et couvre le malheureux de cette auguste étoffe. Ce soldat romain, c’est Martin, fils d’un commandant de la Légion romaine, né en 316 en Pannonie (Nord-Ouest de l’actuelle Hongrie).
Modèle du moine et modèle de l’apôtre
Catéchumène depuis l’âge de 10 ans, à l’insu de ses parents toujours païens, Martin est déjà en route vers le Christ quand survient l’épisode fondateur d’Amiens. La nuit suivante, le Christ lui apparaît en songe, s’adressant à ses anges : « Martin, encore catéchumène, m’a revêtu de cet habit ». C’est l’accomplissement de la parole évangélique : « Ce que vous avez fait au plus petit d’entre les miens, c’est à moi que vous l’avez fait (Mt 25, 40) ». Martin se fait baptiser sans délai et démissionne de l’armée deux ans plus tard, non sans difficultés, pour ne plus servir que le Christ. Il accepte dans un premier temps une charge d’exorciste, mais décline le diaconat, dont il ne se juge pas digne.
La vie de Martin s’inscrit en parfaite harmonie avec le foisonnement apostolique et théologique du IVesiècle, celui d’Augustin, de saint Jérôme, de Jean Chrysostome ou encore d’Hilaire de Poitiers, tous docteurs de l’Eglise, celui aussi du concile de Nicée (325). C’est au cœur de cette authentique effusion de l’Esprit Saint, alors que l’empire est encore partagé entre paganisme et christianisme malgré la conversion de l’empereur Constantin (312), que Martin devient à la fois modèle du moine et modèle de l’apôtre.
Du monastère à l’évêché…
Après sa rencontre avec Hilaire, évêque de Poitiers, Martin fonde vers 360 le premier monastère de Gaule, à Ligugé, à huit kilomètres au sud de Poitiers. Ligugé préfigure la formidable aventure monastique qui transformera plus tard l’Europe médiévale. Il y mène une vie ascétique très sévère, attirant à lui de nombreux disciples. Avec ses frères, il se partage entre la vie solitaire, la vie communautaire et la vie apostolique, parcourant les chemins pour enseigner et soigner. Martin, devenu prêtre, y acquiert une réputation de thaumaturge : les malades et les nécessiteux affluent vers lui.
À la mort d’Hilaire en 367, Martin refuse de lui succéder, au grand désarroi des Poitevins. Quatre ans après, leurs voisins Tourangeaux se montrent à la fois plus rusés et plus pugnaces pour le proclamer évêque de Tours. Martin cède, tandis que certains de ses confrères regardent avec mépris cet homme « mal peigné, aux vêtements sales, à la mine pitoyable ». D’autres reconnaissent en lui le Christ pauvre et le jugent digne de la succession apostolique. Malgré sa charge, Martin conserve son mode de vie monastique et choisit un lieu de retraite à Marmoutier, à deux kilomètres de Tours, où il s’installe dans une cabane de bois puis une grotte. Il y est rejoint par quatre-vingts disciples qui deviennent moines à leur tour.
Évêque, Martin montre un zèle apostolique exceptionnel. Il déracine le paganisme dans les campagnes et enracine la foi au Christ, fondant ses paroisses et installant ses prêtres, semant la réconciliation là où il y a la division. Martin multiplie aussi les voyages en Gaule et en Europe, reproduisant le modèle paulinien de l’apôtre pérégrinant. Luttant contre l’hérésie arienne (négation de la divinité du Christ), se montrant habile et ferme avec les puissants, proche et fraternel avec les pauvres, il répand la foi chrétienne, fondant son action apostolique sur la prière, la pénitence et la charité, sans lesquelles il n’y a pas de fécondité possible. Bientôt, le christianisme, venu d’Orient, gagnera tout l’occident et la France sera un royaume chrétien (baptême de Clovis en 496).
Un rayonnement encore bien présent…
Saint Martin meurt d’épuisement en 397, après avoir passé ses dernières nuits en prière, s’infligeant encore des pénitences sur son lit de cendres. Sulpice Sévère, son hagiographe, rapporta sa dernière parole : « Le sein d’Abraham s’ouvre qui va me recevoir ». Le rayonnement de Martin, hier et aujourd’hui, en France et bien au-delà, est considérable. Plus de cinq cents communes de France portent son nom, et encore plus d’églises. Martin est le patronyme le plus répandu dans notre pays.
Guillaume de Prémare
Aménagement récent de l’église (2008)
Le Père Silvano Bellomo souhaite faire évoluer la disposition de notre église avec comme objectif un rassemblement de la communauté. Il propose de descendre l’autel dans le haut de la nef entre les pilliers qui soutiennent le clocher. Cette disposition nous est proposée pendant le Semaine Sainte.
Voici un extrait de la lettre envoyée au Père Bellomo par le Père Allouchery, Secrétaire général de la Commission diocésaine d’art sacré.
Cher Père Silvano,
Pour l’aménagement d’un autel principal pour la messe paroissiale, il ne convient pas qu’il soit sur l’estrade qui a été posée au bout de la nef, bloquant la porte occidentale. Il faut garder la vision axiale de cette église vers l’Est. Le regard monte vers le chœur lumineux du XVIe siècle.
Vous pouvez construire une estrade en bois recouverte d’une moquette de deux marches sous le clocher entre les piliers en haut de la nef.
Prévoir un autel cubique comme à Louveciennes et un pupitre d’ambon.
Le siège du célébrant peut exceptionnellement se placer en arrière de l’autel dans l’axe.
Sur le premier palier, des choristes peuvent prendre place mais pas en surplomb de l’autel. Ils sont visibles de l’organiste.
Il faut impérativement retirer l’autel en bois sans le dépecer et le placer dans le transept Nord.
Avec l’architecte des Monuments Historiques, voir au repositionnement de l’ancien autel en pierre sur son emmarchement pour être utilisé éventuellement dans cette partie haute de l’église.
Possibilité de réouverture de l’escalier accédant à la crypte.
Avec l’architecte des Monuments Historiques, étudier un nouveau sas pour la petite porte d’entrée, un sas en verre avec bâti en bois bien plus petit que l’actuel, celui-ci est bien trop important et gène la circulation sur la bas côté Sud.
Il y aurait à étudier le réseau et les points d’éclairage dans cette église surtout pour le nouvel autel sous le clocher. Il faudrait également prévoir une meilleure disposition des chaises et des bancs pour l’ensemble des fidèles en faisant attention au cheminement de circulation.
La compréhension des aménagements antérieurs dans ce lieu doit vous permettre d’habiter au mieux cette église, celle d’une vivante assemblée eucharistique et dans une certaine cohérence, donner du sens à ce patrimoine.
Bien fraternellement,
P. Jean-Pierre Allouchery +