Saint Nicaise du Vexin

La légende qui apparaît au XIIème siècle à Rouen relate l’envoi par le pape Clément (IIIème siècle) de Denis, évêque d’Athènes, accompagné de l’évêque Nicaise, du prêtre Quirin et du diacre Scuvidule, en mission pour répandre la foi chrétienne dans notre région. En arrivant à Vaux, près d’une fontaine, un dragon terrorise la contrée. Nicaise avec ses compagnons anéantit l’animal grâce à son étole (voir le blason de Vaux). Trois cent dix-huit personnes se convertissent et reçoivent le baptême au lieu devenu depuis « Fontaine Saint-Nicaise » avec son calvaire. Poursuivant la route, le petit groupe chasse les démons qui hantent une caverne sur la colline de Meulan. Nicaise, à la suite de ces exploits, subit le même sort que Denis : il est supplicié et décapité. Tel est le récit que relatent les Acta Sanctorum rédigés par les moines de Saint-Ouen à Rouen. La légende emploie des symboles : dragon, démons récurrents à l’époque, pour exprimer la lutte entre le bien et le mal à une population majoritairement illettrée.

Fondement de la légende : en réalité, ce récit est calqué très précisément sur la passion de saint Denis et repose sur l’amalgame volontaire de deux faits authentiques incontestables : le martyre de l’évêque Denis à Paris au IIIème siècle et celui de l’évêque Nicaise à Reims au Vème siècle. En effet au Moyen-âge le christianisme, alors largement répandu, s’exprimait tout particulièrement par les pèlerinages. Les tombeaux, les lieux de vie des saints et leurs reliques attiraient les fidèles en grand nombre. Il est compréhensible que dans ce contexte les moines de Saint-Ouen à Rouen aient souhaité favoriser leur secteur en créant ainsi à la fois un mouvement de piété et une source d’activité économique.

L’histoire et les recherches : à partir de l’époque mérovingienne (VIème siècle), des évêques sont établis dans les villes tandis que dans les zones de moindre peuplement, on désigne un prêtre, généralement un ermite, dont l’exemple de vie est censé stimuler la population. Ainsi le long de la Seine, les études ont attesté de la présence de cavernes creusées dans des lieux escarpés et ayant servi d’ermitage. Or, sur le secteur de Vaux, la carte de Cassini (1756) signale l’existence d’un ermitage sur le flanc de la colline, site où la roche meuble se façonne aisément. L’écho de la présence en ce lieu d’une personnalité qui portait le nom de Nicaise, qui n’était pas un évêque mais un simple et pauvre ermite, a traversé les siècles grâce à la légende. S’il n’a jamais été martyr, il a marqué durablement les mémoires des populations alentour.

Aujourd’hui, encore, Vaux-sur-Seine porte différents témoignages et des évocations multiples de saint Nicaise : sites, cadastre, vitraux anciens et modernes, sans oublier la fontaine et son calvaire restaurés l’une et l’autre par les membres de l’association AVRIL.

A Meulan, il faut aussi rappeler que de 1141 à 1793, sur le site actuel de l’hôpital, rayonnait le prieuré bénédictin Saint-Nicaise. Le prestige de ses manifestations pouvait faire pâlir les trois paroisses de la ville. La voie routière et piétonne, qui fait le tour de l’hôpital se nomme Impasse Saint-Nicaise.

Martine Mourier, 

Extrait des Echos de Meulan n° 566

 

A l’appui de l’étude de M. Jacques Le Maho – historien et archéologue, CNRS de Rouen (juin 2006)